Cris et clameurs, alignés dans les rangs Sur le blanc de l’arène, la couleur du sang Ils tombent tous.
Sous le calme de l’arène vide, au milieu des fantômes de ceux tombés pour le plaisir des yeux avides, un grattement régulier vient rompre le silence de plomb que même le vent n’ose briser. Une pelle ramasse le sable souillé par le sang, maniée par des bras frêles, et des mains abimées.
Hurlant en silence son propre chant de misère Un être est fait prisonnier de son cauchemar
L’arène doit être de nouveau immaculée pour la prochaine Hécatombe. Pour que le premier jet écarlate sur le sable blanc puisse être admiré, et acclamé. Plus le spectacle était plaisant, plus la tâche est longue.
Tentant de survivre, cherchant un peu d’air Pourquoi est-elle là seule, sans un regard ?
Une pluie fine se déverse, accompagnant la mélodie légère du raclement sinistre, ramassant les derniers souvenirs restant d’un sang, maintenant froid, ayant animé des corps disparus. L’humidité en soulève l’odeur écœurante, dans cette cuvette entourée de gradins.
Elle-même est condamnée à œuvrer pour nous Une vie de misère, elle se moque de tout
Un bruit mat heurtant le métal. Comme un trésor enfoui sur une plage, cadeau d’une bien cruelle mer, la pointe d’une lance brisée, séparée de son propriétaire par ceux qui l’ont oublié là en ramassant les corps quelques heures plus tôt, est dégagée du sable humide, et disparait dans un mouvement de tissu.
En la voyant si faible, nous crieront en cœur « Allez debout être sans valeur »
Dissimulée dans la doublure d’une veste, bien vite remise sur des épaules ou la pluie fraiche glisse sur la brulure du fer rouge, depuis longtemps apaisée. Qui sait, si un jour, cette lame ne pourrait, comme celle qui vient de la ramasser, gagner une nouvelle vie…